Nous autres humains manifestons notre amour lorsque nous nous faisons réciproquement plaisir sans calcul égoïste. C’est pourquoi nous échangeons des cadeaux. C’est pourquoi nous décorons les maisons et créons une ambiance particulière dans les pièces. Et poutant quel est le plus beau, le meilleur cadeau que nous puissions transmettre? Il y en a un grand, oui, un cadeau à dimension divine que nous pouvons offrir, un cadeau que Dieu nous a révélé et montré en se faisant homme. Je parle de la réconciliation, du pardon. Notre pardon nous rend véritablement à l’image de Dieu; ainsi nous poursuivons ce que Dieu a initié.
Pardonner et comprendre ne font qu‘un. Beaucoup veulent comprendre et puis pardonner. Pourtant l’ordre est en fait à l’inverse: faisons le premier pas et pardonnons, alors nous comprendrons! Un jour deux moines contemplaient dans l’eau cristalline de l’étang des poissons qui nageaient et jouaient. „Que ces poissons sont enjoués et heureux. Ils dansent de joie.“ „Comment sais-tu que ces poissons sont joyeux? Tu n’en es pas un!“ „ Et comment sais-tu que je ne le sais pas? Tu n’es pas moi.“ Fin de la discussion.
Oui, chaque homme est unique. Aucun ne ressemble tout à fait à un autre. Chacun ressent, pense et réagit autrement. C’est là la cause des tensions et des conflits. Si je peux accepter l’autre tel qu’il est, si je suis prêt à lui pardonner et à l’accepter tel qu’il est, un nouveau monde s’ouvrira et de nouvelles perspectives se feront jour.
Beaucoup de gens souffrent de ne pas pouvoir et de ne pas vouloir pardonner. Cela mène à des problèmes de contact, des tensions et des conflits. Ce n’est qu’à partir du moment où je peux accepter l’autre dans sa différence qu‘une vie paisible en commun devient vraiment possible. Je me souviens d’un jeune moine, un type vraiment difficile. Le père abbé lui répétait: „Cher frère, change, change donc!“ Mais il ne changea jamais. Il resta toujours buté. Au fil du temps arriva un autre Supérieur qui lui assura: „Cher frère, ne change pas. Je t’accepte et je t’aime tel que tu es!“ Le soir même le jeune moine annonça à ses frères: „Aucun abbé auparavant ne m’a jamais dit qu’il m’aimait et m’acceptait comme je suis. Cela m’a transformé. Dès aujourd’hui je vais changer.“
Notre vie est pleine de possibilités et d’opportunités favorables à nous réconcilier avec les autres, à pardonner à notre prochain, à susciter la paix. C’est là vraiment un cadeau tout à fait bien choisi pour Noël.
Il est toujours difficile de faire le premier pas. Pourtant les longs voyages commencent aussi par un premier pas. Qui le risque? Faire un sourire, envoyer un petit mot, inviter à un repas… Il est humain de pécher, c’est de pardonner qui est divin! Le pardon fait des miracles. Noël est en réalité la fête de la réconciliation. Dieu nous a réconciliés avec Lui et les uns avec les autres.
Pardonner signifie aussi un peu s’oublier soi-même, un peu se sacrifier. Une nouvelle société, une nouvelle humanité, un nouveau monde sont toujours possibles là où les hommes osent se renouveler eux-mêmes, là où nous autres humains reconnaissons notre prochain dans les autres.
Pensons à ce qui est bon et beau, pensons au pardon et à la réconciliation, à être bons et aimables. Tout vient du coeur. Car on ne voit bien qu’avec le coeur. Pensons avec notre coeur, alors nous comprendrons les hommes. Tout se trouve dans le coeur. Car le coeur éclaire la raison. Le plus beau reste caché aux yeux. Une fois que le coeur est complètement libéré de la méfiance et de l’égoïsme, le chemin de la paix se trouve aplani. Un peu de lumière vient éclairer l’obscurité. Et nous pouvons dire: „ Voilà que tu apportes de la lumière dans l’obscurité de ma vie!“
Le pardon n’est pas un signe de faiblesse, mais bien plutôt une grâce qui nous place au-dessus de nos ennemis.
Un jour le président américain Abraham Lincoln était troublé parce qu’il avait perdu la guerre. Ses conseillers lui dirent: „Monsieur le Président, vous devez être plus dur et anéantir vos ennemis“ A quoi ce dernier répondit qu’il avait déjà anéanti ses ennemis en en faisant ses amis.“ Le pardon ne nous libère pas seulement des puissances du Mal qui nous causent du tord et nous blessent. Le pardon rompt le cercle vicieux de la revanche. Pardonner nous libère des vexations et finit par guérir nos blessures. Cela rend alors possible une vie communautaire les uns au service des autres.
Une femme juive qui avait horriblement souffert en camp de concentration – son mari et ses enfants y avaient été exécutés, elle seule avait survécu – s’engagea après la guerre pour la réconciliation et le pardon. A la fin d‘une conférence sur ce sujet un homme vint vers elle et la félicita. Elle rconnut en lui l’ancien officier nazi qui l’avait torturée et avait tué son mari. Elle fut choquée et paralysée au point qu’elle se trouva incapable de lui tendre la main. Non, elle n’arrivait pas à lui pardonner. Pleine de rage elle ferma les yeux. Soudain elle reconnut qu’elle prêchait la réconciliation et la paix alors qu’elle-même ne pouvait pas pardonner! Pourquoi? Elle fit silence pour prier. Renforcée intérieurement elle décida immédiatement de pardonner à son ennemi. Elle l’embrassa et pardonna. Une liberté et une légèreté intérieures l’envahirent.
Puisse notre disposition et notre joie à pardonner être contagieuses. La joie n'abolit pas l’obscurité. Mais tout se voit dans une nouvelle perspective. Que l’anticipation de la Nuit de Noël soit marquée par le pardon. Alors la lumière de Noël ne brillera pas seulement dans nos maisons, mais aussi dans nos coeurs.